
Extrait du film “Wild Angels”, Easy est au premier plan, un cigare en bouche
Earl Z Finn est né le 12 décembre 1937 à Philadelphie, en Pennsylvanie et malheureusement décédé en 2020. Surnommé « Easy », car en anglais les initiales EZ se prononcent ainsi, il a inspiré le film Easy Rider, et a joué aux côtés des plus grands, comme Denis Hopper ou Peter Fonda. C’est avec lui qu’est né notre circuit “La Route Dixie”, ce fameux itinéraire réalisé par Johnny en 2016.
A l’époque, figurant dans le film « Wild Angels » il avait séduit Peter Fonda et Jack Nicholson avec le récit de ses aventures. Président d’un grand club de moto, il avait l’habitude de se rendre à La Nouvelle-Orléans pour y rejoindre les autres membres du club à l’occasion de Mardi Gras. Soirée après soirée, pendant le tournage, il avait raconté sa vie, ses routes. Denis Hopper s’appropria son histoire pour incarner le fameux “Easy Rider”. Zoom sur une interview, menée par les fondateurs de West Forever qui date de plus de 20 ans !
Easy, comment es-tu venu à la Harley ?
Tout gamin, le bruit du V-Twin faisait déjà battre mon cœur. J’en étais amoureux. Je regardais les motards faire la course dans les rues du quartier où j’habitais. Je ne pensais pas en avoir une, un jour. Je n’avais pas un sou en poche (ndlr : l’enfance d’Easy s’est déroulée à l’époque la plus noire de l’histoire des Etats-Unis – 7 millions de chômeurs en 1937). J’ai travaillé tout un été pour m’acheter ma première moto. Le jour de mes 16 ans, j’en ai pris possession. Et c’était celle de Lee Marvin, du film « The Wild Ones ». Je ne le savais pas en l’achetant, je l’avais trouvée chez un marchand pour 300 dollars. Je ne connaissais rien au cinéma à l’époque. Un Knukelhead de 1947… quelle moto ! Si je l’avais gardée…elle vaudrait de l’or aujourd’hui ! Quand j’ai ramené la moto à la maison, ma mère m’a viré. A 16 ans, j’ai dormi 6 mois dans le garage, à côté de ma moto. Il a bien fallu que je me débrouille.
Je travaillais, donc, la nuit dans une usine de plastique, comme cela, le jour, je pouvais rouler. J’étais encore un vrai gamin. Les deux premiers mois, je ne faisais que descendre et remonter la rue. Je n’allais pas très loin. Petit à petit, après m’être aventuré autour du pâté de maison, je roulais jusqu’à la plage, en empruntant « Sunset Boulevard ». Je roulais au petit matin, après le boulot. A cette heure, il n’y avait pas beaucoup de circulation. Je faisais des aller-retour et je m’en lassais jamais. Comme je tombais souvent en panne, j’étais forcé de la réparer. J’inventais des systèmes pour qu’elle roule mieux. J’ai tout appris sur le tas. J’en ai fais mon métier. J’ai commencé à customiser les Harley qui roulaient sur Los Angeles. Je faisais les pièces moi-même, il n’y avait pas de catalogue d’accessoires à l’époque ! Un jour j’ai vendu une Harley pour 1000 $…jamais une Harley ne s’était vendue aussi cher avant. C’était une fortune en ces temps difficiles. Tout le monde en a parlé… !
Donc là on était autour des années 1953, le tournage d’Easy Rider c’était en 68, qu’as-tu fait pendant cette période ?
Ne me turlupinez pas trop avec les dates, je n’ai jamais eu une bonne relation avec les chiffres. Je garde des sentiments, des images, des anecdotes, jamais des chiffres. Les Harley, c’était ma vie ; je les réparais, les modifiais. Mon truc, c’était d’en améliorer le confort ; je soudais, je fabriquais des pièces, inventais des nouveaux guidons. J’ai préparé les motos pour le film « The Wild Angels » de Roger Corman tourné en 1965, 3 ans avant « Easy Rider » avec Nancy Sinatra, Peter Fonda, Bruce Dern, Diane Lane. J’ai encore une photo du premier jour de tournage où je conclus le deal avec eux. En échange de la mise à disposition des motos (16 exactement), j’obtins ma carte SAG (union des acteurs). J’ai eu un bon rôle dans le film : je jouais mon propre personnage…!
C’est à cette époque que tous les matins Peter Fonda et Denis Hopper venaient me chercher en limousine et ils me posaient plein de questions sur mes traversées d’ouest en est. Je parlais, je parlais, je parlais et ils m’écoutaient. Ils paraissaient fascinés par ce que je disais…

Easy donne la réplique à Bruce Dern et Lou Procopio
C’était quoi à la base l’histoire ? Pourquoi cette traversée ?
A l’époque, j’avais un club de motos dont j’étais le président. Chaque année, j’allais retrouver les membres du club à la Nouvelle-Orléans pour fêter le Mardi Gras. Il m’arrivait toujours pleins d’histoires sur la route.
Toutes les anecdotes du film te sont-elles arrivées ou bien avez-vous un peu brodé autour ?
Il faut savoir qu’à cette époque c’était encore comme au temps du Far West. Nous étions des sortes de cowboy, considérés comme hors la loi. Nous étions admirés ou détestés. Ils ont pris des histoires qui me sont arrivées, ils les ont embellies, élaborées, trafiquée. Un jour par exemple, je me suis retrouvé en prison et mes gars sont venus me sortir de là. Dans le film, c’est Peter qui se retrouve derrière les barreaux ! De ce temps là, je voyageais seul ou alors avec toute la bande. Dans le film, ils ont choisi d’être deux. Pourquoi pas ?
Est-ce qu’ils étaient des bikers ?
Non, pas du tout, aucun d’eux d’ailleurs ! Dans “Wild Angels“, il y a une scène dans une église. Peter est debout derrière moi et il répète : “nous voulons êtres libres, nous voulons êtres libres !” On peut voir ma tête… je serre les dents… putain, mais c’étaient mes mots, ma vie, pas la sienne. C’était à moi de les dire… mais c’était lui la star du film, c’est la vie, je suppose ?

Extrait du film “Wild Angels”, Easy est à droite
Est-ce que l’itinéraire du film Easy Rider était le tien ?
Montre moi la carte… ça fait si longtemps ! Mon truc à moi c’était d’avoir un sac de couchage. Je partais seul, je dormais à la belle étoile. La traversée me prenait environ 3 semaines. Alors, c’était l’aventure. Deux ou trois nuits en dessous d’un arbre, près d’un ruisseau puis la 4ème, je m’arrêtais dans un motel pour prendre une bonne douche et dormir dans un lit. Ça, c’était le rêve, c’était ma vie. Rouler à l’aise, prendre les petites routes. J’arrivais une semaine avant le Mardi Gras ; je louais un “House Boat” avec l’argent que mes gars et moi on avait accumulé durant l’année. La route que t’as tracée là, c’est celle que je prenais lorsque j’étais seul. Ce n’était pas la plus courte, mais c’était de loin la plus belle. Cela ne nous intéressait pas de prendre le chemin le plus court. A peu de chose près, ce doit être celle du film, mas cela n’a pas vraiment d’importance, car dans le film, ils n’ont pas fait la route, ils ont été tourner des scènes ici et là…
Sur la Route Dixie, vous retrouverez plusieurs des lieux de tournage du film, mais c’est finalement de si peu d’importance. Easy nous avait donné la réponse à nos interrogations : la route choisie par West Forever, pour des raisons touristiques, était à peu près celle choisie par les héros du films. Pour la beauté des paysages, pour le plaisir de la route, pour le bonheur de partager des aventures magnifiques.
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